Après plus d'une décennie à la tête de la matinale de France Inter, Léa Salamé a tiré sa révérence en juin dernier, laissant derrière elle une émission qui a marqué la radio publique. À la rentrée, elle occupera désormais le fauteuil du 20 Heures de France 2, succédant à Anne-Sophie Lapix. Un nouveau défi professionnel qui s’inscrit dans une continuité, mais aussi dans une rupture émotionnelle profonde, marquée par un drame personnel qui continue de la hanter.

Une décennie de radio marquée par des liens humains forts

Durant ces onze années, Léa Salamé a forgé une relation professionnelle et humaine intense avec l’équipe du "7/9", notamment avec Nicolas Demorand, son binôme à l’antenne. Ensemble, ils ont animé une matinale influente, écoutée par des millions d’auditeurs. En juillet, lors de son dernier jour à l’antenne, elle a prononcé un hommage vibrant à son collègue : « Je t’aime, merci pour tout, pour le supplément d’âme et d’humanité. »

La complicité entre les deux journalistes s’est exprimée avec émotion en direct, révélant la dimension humaine de cette matinale, bien au-delà de sa portée éditoriale.

Le drame silencieux : le suicide de Mathieu Sarda

Mais cette belle aventure radiophonique est aussi marquée par un traumatisme. En juin 2020, Mathieu Sarda, programmateur emblématique du 7/9, a mis fin à ses jours à seulement 41 ans. Une disparition brutale qui a ébranlé toute l’équipe.

Invisible aux yeux du public mais central dans l'organisation quotidienne de l’émission, Mathieu était considéré comme « l’âme de la matinale ». À l’antenne, Nicolas Demorand et Léa Salamé lui ont rendu hommage, bouleversés par cette perte irréparable.

Un hommage bouleversant et durable

Dans un entretien accordé à Paris Match en juillet 2025, Léa Salamé est revenue pour la première fois, avec franchise et douleur, sur cette épreuve encore vive. « Je ne m'en remets pas. Je m'en veux de n'avoir pas vu son mal-être », confie-t-elle, émue.

Elle décrit un homme discret, passionné de culture et de littérature, avec qui elle avait tissé un lien unique : « Il me parlait de Juliette Binoche et d’Annie Ernaux avec passion. Je me voyais faire toute ma carrière avec lui. »

Une blessure intime, encore vive cinq ans après

L’annonce de la mort de Mathieu Sarda reste gravée dans sa mémoire. « Quand Laurence Bloch nous a annoncé la nouvelle dans son bureau, je me suis effondrée par terre. Je suis restée là, incapable de bouger. »

Cette blessure, Léa Salamé la porte encore aujourd’hui. En quittant la matinale, elle a aussi refermé symboliquement cette période marquée par le deuil, sans pour autant tourner la page.

La santé mentale en milieu professionnel : un sujet encore tabou

Le cas de Mathieu Sarda met en lumière une réalité trop souvent ignorée : la souffrance psychologique au travail. Malgré son rôle central dans l’équipe, son mal-être n’a pas été perçu. Ce silence, cette invisibilité, sont autant d’éléments qui interrogent le monde professionnel et médiatique.

Un nouveau départ sous le signe du souvenir

Alors qu’elle s’apprête à débuter une nouvelle phase de sa carrière au journal de 20 heures sur France 2, Léa Salamé reste marquée par ce drame intime. Sa sincérité, sa vulnérabilité et son hommage constant à Mathieu Sarda témoignent de l’humanité qu’elle insuffle dans son parcours professionnel.

Ce nouveau chapitre ne se fera pas dans l’oubli, mais dans le prolongement d’une mémoire respectée et d’un engagement personnel renouvelé pour donner une place à l’humain, même dans le rythme exigeant des médias.

Une journaliste engagée, une femme marquée

Léa Salamé incarne une génération de journalistes capables de conjuguer rigueur et émotion, performance et sensibilité. À travers son témoignage, elle offre une parole rare sur la douleur silencieuse au travail et sur l’importance de rester à l’écoute de ceux qui nous entourent.

Alors qu’elle entame une nouvelle aventure télévisuelle, son regard reste tourné vers ceux qui l’ont construite. Un hommage à la fois pudique et bouleversant à son ami disparu, et un appel à prendre soin de l’invisible.