Porter le nom d’un acteur mondialement reconnu ne garantit ni bonheur ni équilibre. C’est ce que révèle Elizabeth Ann Hanks, fille de Tom Hanks, dans un ouvrage autobiographique intitulé The 10. A Memoir of Family and the Open Road, paru le 8 avril 2025. Ce récit bouleversant, relayé dans Paris Match le 10 juillet 2025, dévoile les coulisses tragiques de son enfance, vécue dans l’ombre des projecteurs, auprès d’une mère rongée par des troubles psychiques.

Si son père est devenu l’un des visages les plus emblématiques du cinéma américain, sa mère, Susan Dillingham, actrice oubliée et souffrante, l’a plongée dans un environnement instable et dangereux. À travers son témoignage, Elizabeth révèle une facette méconnue de l’univers hollywoodien : celui de l’abandon émotionnel et du chaos domestique.

Une idylle universitaire qui tourne au drame familial

L’histoire d’Elizabeth débute dans les années 1970 à Sacramento, où ses parents se rencontrent lors de leurs études de théâtre à l’université. L’amour naît rapidement entre Tom Hanks et Susan Dillingham, et en 1978, le couple se marie. De cette union naissent Colin en 1977, et Elizabeth Ann en 1982.

Alors que la carrière de Tom Hanks s’envole après le succès du film Splash en 1984, la relation du couple s’effrite. Finalement, ils divorcent. Susan obtient la garde des enfants. Tandis que Colin choisit de partir vivre avec des proches à Sacramento, Elizabeth reste seule avec leur mère, dont l’état mental ne cesse de se détériorer.

Une enfance loin du rêve hollywoodien

Contrairement à l’image de l’enfant de star entouré de luxe et de confort, Elizabeth décrit une réalité tragiquement différente. « Avec le nom que je porte, on m’imagine dans un environnement privilégié. En vérité, je crevais de faim dans une maison vide. Ma mère m’enfermait souvent dans un placard », confie-t-elle dans son livre.

Isolée, affamée, sans cadre parental stable, elle grandit dans la peur. Susan, qui n’a jamais été diagnostiquée officiellement, présentait pourtant des symptômes caractéristiques de troubles bipolaires : phases d’exaltation créative suivies de profondes dépressions, d’agressivité et de comportements erratiques.

Les tourments d’une mère entre génie et folie

« Elle entendait la voix de Dieu. Et parfois, elle cassait tout dans la maison. Alors je me cachais. J’attendais que ça passe », raconte Elizabeth. Malgré l’amour sincère qu’elle portait à sa mère, l’instabilité émotionnelle de celle-ci la plongeait dans un climat de terreur quotidienne.

Tableau paradoxal, Susan Dillingham pouvait se montrer brillante, écrire de la poésie ou peindre avec une grande sensibilité, avant de sombrer brutalement dans des crises de larmes, de colère, ou d’isolement total. Une situation impossible à comprendre pour une enfant.

Une rupture brutale, le début d’une reconstruction

À l’âge de 14 ans, l’inacceptable se produit : Susan devient physiquement violente envers sa fille. Elle l’attrape par les cheveux, la traîne au sol et l’enferme à nouveau dans un placard. Cette scène a lieu sous les yeux de Colin, qui décide de prévenir leur père.

Ce moment marque un tournant. Tom Hanks engage une procédure judiciaire et parvient à obtenir la garde d’Elizabeth. Il lui offre alors une nouvelle vie, loin du tumulte, dans un cadre structuré et bienveillant.

Rita Wilson, un pilier dans l’ombre

Dans sa nouvelle vie, Elizabeth découvre une figure maternelle de substitution : Rita Wilson, seconde épouse de Tom Hanks. Bien que jamais intrusive ni autoritaire, Rita devient une présence essentielle pour la jeune fille en reconstruction.

« Elle n’a jamais cherché à remplacer ma mère. Mais elle a réparé ce qui pouvait l’être », écrit Elizabeth avec gratitude. Cette période marque le début d’un apaisement progressif dans sa vie, mais les blessures de l’enfance restent profondes.

Un dernier voyage pour tenter de comprendre

À l’âge adulte, Elizabeth entreprend un road trip avec sa mère, dans une tentative de renouer un lien. Le voyage est marqué par des tensions, des reproches, mais aussi des moments de rare complicité. Susan reprochait à sa fille de lui avoir « enlevé sa seule source de revenus », en référence à ses allocations de mère isolée.

Ce périple permet néanmoins à Elizabeth d’accéder à une meilleure compréhension de la souffrance mentale de sa mère. Elles parviennent à échanger avec sincérité. Ce sera leur dernière véritable interaction avant la disparition de Susan, décédée en 2002 d’un cancer des os.

L'héritage émotionnel et littéraire d’Elizabeth Ann Hanks

Elizabeth a transformé sa douleur en écriture. Son livre The 10 retrace à la fois les zones d’ombre de son passé et les instants lumineux, les apprentissages nés de la souffrance, et les chemins empruntés pour se reconstruire. En évoquant cette enfance loin des clichés de privilège, elle offre une parole rare, précieuse et courageuse.

Un nom célèbre, un combat silencieux

L’histoire d’Elizabeth Ann Hanks illustre à quel point l’image publique peut masquer des réalités tragiques. Derrière le prestige d’un patronyme, se cache parfois un enfant meurtri, en quête de paix intérieure. À travers son livre, elle ouvre un dialogue sur la santé mentale, la résilience et l’amour filial, aussi complexe soit-il.

Son témoignage interpelle et bouleverse, rappelant que le vrai courage ne réside pas toujours dans la lumière des projecteurs, mais souvent dans la capacité à survivre dans l’ombre.