Disparue à l'âge vénérable de 101 ans, Jane Morgan laisse derrière elle un héritage musical et scénique immense. Icône des années 50, elle fut l’une des premières artistes américaines à triompher en France, notamment grâce à sa collaboration avec Gilbert Bécaud.

Une disparition qui émeut le monde artistique

Jane Morgan s’est éteinte paisiblement à Naples, en Floride, en soins palliatifs, selon un communiqué de sa famille relayé par The Hollywood Reporter. Décédée de causes naturelles, elle laisse une carrière qui aura traversé les décennies avec élégance et discrétion.

Des débuts prometteurs et un destin français

Née Florence Catherine Currier le 3 mai 1924 dans le Massachusetts, Jane développe très jeune un amour profond pour la musique. À cinq ans, elle prend des cours de chant et de piano. Diplômée de la Seabreeze High School, elle intègre ensuite la Juilliard School à New York, référence mondiale en matière de formation musicale classique.

En 1948, à 24 ans, elle traverse l’Atlantique pour tenter sa chance à Paris, sous l’impulsion de Bernard Hilda, producteur de renom. Elle devient alors l’une des attractions majeures du Club des Champs Élysées.

Paris : la scène de sa consécration

À Paris, Jane Morgan interprète des titres en français et en anglais, séduit le public par son accent charmant et sa voix suave. Elle collabore avec Bernard Hilda et enregistre plusieurs chansons avec son orchestre. Son talent ne passe pas inaperçu : Charles Trenet lui consacre plusieurs compositions.

Le tournant : "Fascination" et la conquête de l’Amérique

En 1956, elle sort son premier album : The American Girl From Paris. L’année suivante, elle enregistre Fascination, chanson française de 1905 revisitée avec The Troubadors. Ce morceau iconique devient la bande originale du film Love in the Afternoon de Billy Wilder, avec Audrey Hepburn et Gary Cooper.

Ce succès international lui ouvre les portes des studios américains. Dans les années 60, elle enchaîne les disques d’or, anime sa propre émission sur NBC et chante lors des cérémonies des Oscars, notamment en duo avec Michel Legrand.

Jane Morgan et Gilbert Bécaud : une alliance artistique mémorable

C’est en 1958 que Jane enregistre l’adaptation anglaise de "Le jour où la pluie viendra" de Gilbert Bécaud, devenue "The Day the Rains Came". Ce titre se hisse à la première place du classement britannique en janvier 1959.

Une femme accomplie sur scène et dans sa vie personnelle

En 1965, Jane Morgan épouse l’acteur et producteur Jerry Weintraub. Ensemble, ils adoptent trois enfants. En 1970, elle sort son ultime album In Nashville, avant de se consacrer au théâtre et à Broadway, où elle continue d’éblouir.

Un hommage gravé dans la mémoire d’Hollywood

Le 6 mai 2011, elle reçoit une étoile sur le Hollywood Walk of Fame, reconnaissance ultime d’une carrière jalonnée de succès artistiques. Si sa notoriété a baissé avec le temps, son influence sur la musique francophone et internationale demeure indéniable.

Un héritage musical riche et intemporel

Jane Morgan a su naviguer entre les styles : jazz, chanson française, ballades romantiques… Son timbre raffiné et son élégance ont conquis des générations d’auditeurs. Elle a su marier la sensibilité européenne à l’efficacité américaine.

Si le nom de Jane Morgan est parfois méconnu du grand public aujourd’hui, son œuvre musicale mérite d’être redécouverte. Elle fut une véritable passerelle entre deux continents, une voix franco-américaine singulière, pionnière de la scène internationale. À l’heure où elle nous quitte, c’est toute une époque qui s’éteint avec elle.