Alors que Donald Trump a relancé une guerre tarifaire entre les États-Unis et le reste du monde, l’Union européenne envisage une contre-attaque économique. Parmi les mesures envisagées : une taxation des géants du numérique américains. Une décision qui pourrait bien faire grimper le prix des abonnements à Netflix, Prime Video ou Apple TV+ pour les consommateurs français.
Depuis son retour à la Maison Blanche en janvier 2025, Donald Trump n’a pas perdu de temps pour remettre en œuvre certaines de ses politiques les plus controversées. Parmi elles, une relance agressive des droits de douane sur les importations étrangères, censée protéger les industries américaines. Résultat : la tension monte entre Washington et Bruxelles. Et l’un des premiers effets concrets pour les Français pourrait bien être une hausse du prix de leurs abonnements aux plateformes de streaming.
Une guerre tarifaire qui dépasse les frontières
La nouvelle est tombée le 10 avril : le président Trump a décidé d’instaurer, jusqu’à juillet 2025, des droits de douane accrus sur de nombreux produits étrangers. Une mesure qui vise principalement les importations en provenance de l’Union européenne, de la Chine et d’autres pays considérés comme rivaux économiques.
La réponse européenne ne s’est pas fait attendre. Réunis à Varsovie, les ministres des Finances des 27 États membres ont commencé à discuter d’un plan de riposte. Et parmi les pistes sérieusement envisagées : une taxation spécifique sur les services numériques américains.
Lors de son passage dans l’émission BFM Politique ce 13 avril, le ministre français de l’Économie et des Finances a confirmé l’hypothèse. Interrogé sur l’impact potentiel d’une telle mesure sur les consommateurs, Éric Lombard n’a pas éludé la question : "C’est tout à fait possible", a-t-il reconnu.
Des plateformes dans le viseur de l’Europe
Netflix, Prime Video, Apple TV+, Disney+… Ces services américains de vidéo à la demande (SVOD) sont dans le collimateur des décideurs européens. Pour justifier leur inclusion dans un éventuel plan de rétorsion économique, les autorités invoquent une raison simple : ces entreprises réalisent d’importants bénéfices en Europe tout en échappant à de nombreuses taxes locales grâce à des optimisations fiscales massives.
L’idée serait donc de rééquilibrer la balance commerciale en taxant leur activité sur le sol européen. Une telle taxe, si elle était adoptée, serait logiquement répercutée sur le prix des abonnements. D’autant plus que les géants du streaming, souvent déjà déficitaires sur certains marchés, cherchent à préserver leur rentabilité.
Une hausse de 2 à 3 euros par mois ?
Lors de son entretien télévisé, Éric Lombard a reconnu que le consommateur final risquait d’en faire les frais : « La guerre tarifaire que mène Donald Trump, c’est augmenter le prix des biens et des services. Par définition, dans la réponse européenne, quel que soit le secteur ciblé, le prix de ces biens et de ces services augmentera. »
Le journaliste Guillaume Daret a alors insisté : "Donc, on peut taxer Netflix et demain, ceux qui nous regardent et qui sont abonnés vont payer peut-être trois euros de plus sur leur abonnement ?". Une question directe à laquelle le ministre n’a pas souhaité répondre de manière chiffrée, mais sans non plus démentir cette hypothèse.
Un scénario crédible, si l’on considère qu’en France, l’abonnement Netflix Premium (UHD) coûte actuellement 19,99 € par mois. Ajouter 2 ou 3 euros à cette facture représenterait une hausse de plus de 10 %. Un impact loin d’être négligeable, surtout dans un contexte où l’inflation pèse déjà sur le portefeuille des ménages.
Prime Video et Apple TV+ aussi concernés
Netflix ne serait évidemment pas la seule plateforme concernée. Prime Video, le service de streaming d’Amazon, est également dans le viseur de Bruxelles. Aujourd’hui proposé à 6,99 € par mois, son tarif pourrait lui aussi grimper si une taxe européenne venait à être mise en place. Même chose pour Apple TV+, actuellement affiché à 9,99 € par mois.
Le problème est d’autant plus complexe que ces plateformes sont souvent liées à d’autres services. Prime Video, par exemple, est intégré à l’abonnement Amazon Prime, qui comprend également la livraison express, l’accès à Amazon Music et d’autres avantages. Une hausse de tarif pourrait donc entraîner une cascade de répercussions dans l’ensemble de l’écosystème Amazon.
Une taxation en mai ? L’Europe dans l’attente
Pour l’heure, rien n’est encore acté. Le ministre français l’a rappelé : la Commission européenne est en train d’évaluer les options disponibles, et une concertation à 27 doit avoir lieu avant toute mise en œuvre. Les premières décisions pourraient être prises à partir de mai 2025, en fonction de l’évolution du conflit commercial avec les États-Unis.
L’objectif affiché par Bruxelles reste cependant d’éviter une escalade. Éric Lombard l’a martelé : "Notre priorité, c’est d’aboutir à un abaissement de ces droits de douane et donc de négocier." Mais dans l’hypothèse où la tension persiste, les Européens entendent bien démontrer leur capacité à répondre de manière ferme et ciblée.
Les abonnés français inquiets
Sur les réseaux sociaux, de nombreux internautes ont déjà exprimé leur inquiétude face à une possible hausse des abonnements. Pour beaucoup, ces services représentent une alternative économique à la télévision traditionnelle ou au cinéma. Une hausse de quelques euros pourrait suffire à remettre en cause leur rentabilité perçue.
"Je paie déjà presque 20 € pour Netflix, si ça augmente encore, je résilie", menace un utilisateur sur X (anciennement Twitter). D’autres pointent du doigt les nombreux changements récents apportés aux abonnements : fin du partage de compte, réduction du catalogue disponible, publicité sur les forfaits les moins chers…
Face à ces frustrations, certains envisagent même de se tourner vers des alternatives illégales, comme le streaming ou le téléchargement pirate. Une tendance que les autorités européennes souhaitent évidemment éviter.
Une réforme du marché numérique en toile de fond
Cette guerre tarifaire relance aussi un débat plus global sur la souveraineté numérique de l’Europe. Depuis plusieurs années, les responsables politiques appellent à une meilleure régulation des géants du numérique, souvent perçus comme trop puissants et peu redevables envers les États dans lesquels ils opèrent.
La taxe sur les services numériques (souvent surnommée "taxe GAFA") fait partie de ces projets avortés ou repoussés, faute d’accord entre les États membres ou sous pression diplomatique américaine. Aujourd’hui, avec le retour de Trump et sa politique protectionniste, l’Union européenne pourrait bien se retrouver dans l’obligation d’aller au bout de cette logique.
Ce que cela signifie pour les consommateurs
Concrètement, si la taxation est adoptée en mai et appliquée dans les semaines suivantes, les Français pourraient voir leurs abonnements Netflix, Prime Video ou Apple TV+ augmenter dès l’été 2025. Cela tomberait en pleine période de vacances, un moment où la consommation de contenus numériques explose traditionnellement.
Les plateformes pourraient également choisir d’absorber temporairement cette taxe pour ne pas perdre de clients, mais cela semble peu probable à moyen terme. À l’heure où la guerre du streaming fait rage et que chaque service cherche à se démarquer, la rentabilité est plus que jamais au cœur des stratégies commerciales.
Conclusion : une facture qui s’alourdit à l’horizon
Si rien n’est encore officiellement décidé, les signaux envoyés par l’Union européenne et les propos du ministre français laissent peu de place au doute : les abonnés français doivent se préparer à une possible hausse de leurs tarifs de streaming dans les mois à venir. Le retour de Donald Trump à la présidence américaine ravive les tensions commerciales mondiales, et les services numériques font partie des premières cibles de l’Union européenne.
Reste à savoir si les négociations en cours permettront d’éviter cette issue… ou si les amateurs de séries et de films devront payer le prix fort de ce bras de fer transatlantique.