La chaîne cryptée Canal+ traverse une période particulièrement trouble. Une série de mises à pied et un licenciement secouent actuellement le service rugby. Selon des révélations exclusives du quotidien L'Équipe, ces mesures font suite à une enquête interne lancée après des plaintes pour comportements sexistes et propos déplacés.
Déclenchement de l’enquête : un reporter licencié pour comportements jugés sexistes
L’affaire débute en décembre 2024, lorsqu’un reporter-commentateur du service rugby est licencié. En cause : des messages obscènes envoyés à deux collègues féminines. L'une d'entre elles aurait aussi été sollicitée à consommer de la drogue, selon des témoignages.
Parmi les messages incriminés figure une phrase glaçante : "J’ai envie de te démonter." Le journaliste concerné nie les accusations, parlant de conversations consenties et de messages sortis de leur contexte. Il a d’ailleurs engagé une procédure devant les prud’hommes.
Des antécédents révélateurs : une ambiance problématique déjà dénoncée
Avant ce licenciement, un autre journaliste en contrat court sur Infosport+ avait également été remercié à l’automne 2024 après des blagues jugées sexuellement explicites. Là encore, les faits sont contestés, et une procédure judiciaire serait envisagée.
Ces cas isolés se sont révélés être les premières fissures d’un système plus profondément affecté. Une enquête interne a été ordonnée, récoltant 34 témoignages, certains anonymes, qui dressent un portrait ambivalent de l’environnement de travail.
Résultats de l’enquête : un service divisé entre excellence professionnelle et sexisme ambiant
Bien que la majorité des personnes interrogées évoquent une ambiance "professionnelle et respectueuse", près de 25 % d’entre elles dénoncent un climat marqué par le sexisme. Le terme de "fonctionnement masculiniste" revient de manière récurrente dans les déclarations.
Catégorie | Pourcentage | Observations |
---|---|---|
Ambiance irréprochable | 75% | Relations professionnelles saines |
Climat sexiste | 25% | Blagues sexuelles, propos déplacés, domination masculine |
Réaction de la direction de Canal+ : une tolérance zéro affichée
Le 2 juin 2025, Maxime Saada, président du groupe Canal+, convoque le service rugby. Il y présente personnellement les résultats de l'enquête. Après avoir consulté les messages envoyés aux victimes, il les qualifie d’"accablants". Il réaffirme la politique de tolérance zéro concernant le sexisme et les comportements inappropriés, une position soutenue par Thomas Sénécal, directeur des sports.
Sanctions disciplinaires : cinq journalistes mis à pied
Suite à cette réunion, cinq journalistes sont placés en mise à pied conservatoire, dont trois en CDD et deux en CDI. Ces mesures sont la conséquence directe des nouvelles révélations issues de l’enquête, notamment des propos jugés gravement déplacés. Un exemple particulièrement choquant aurait été tenu à propos d’une consultante rugby : "Elle devrait se faire violer par un mec qui sort des Baumettes, ça lui ferait du bien."
Des mesures définitives sont attendues dans les prochains jours, alors que le dossier est désormais entre les mains de la direction du groupe.
Une affaire symptomatique d’un malaise plus profond dans les médias sportifs ?
Ce scandale dépasse le cadre du service rugby de Canal+. Il pose la question de la gestion des comportements sexistes dans le milieu journalistique sportif, longtemps dominé par une culture machiste tolérée. La mise en lumière de ces comportements pourrait entraîner un changement plus large, au-delà de cette affaire spécifique.
Le syndicat +Libres, majoritaire au sein de Canal+, exige d’ores et déjà une transformation structurelle de l’organisation des équipes et la mise en place de mécanismes de prévention renforcés.
Vers un tournant pour Canal+ et les médias sportifs ?
Ce séisme interne au service rugby de Canal+ pourrait bien devenir un point de bascule dans la gestion des ressources humaines au sein des médias audiovisuels. Le traitement exemplaire de ce dossier et les décisions attendues de la direction pourraient servir de modèle – ou de repoussoir – pour d’autres rédactions confrontées à des problématiques similaires.
Il reste à voir si cette affaire marquera un réel tournant ou si elle sera classée parmi d'autres polémiques médiatiques éphémères. Une chose est certaine : la parole se libère, et les comportements abusifs ne sont plus tolérés en silence.